La Beauté…

"Dans nos ténèbres,
il n'y a pas une place pour la beauté.
Toute la place est pour la beauté."

René Char
Feuillets d'Hypnos

                                             ***

                       "Il ne faut pas jeter les rêves
parce qu'on n'a pas su les raconter,
il faut les façonner
jusqu'à ce qu'ils trouvent les mots
et l'auréole qui leur conviennent."

             Gianni Celati
L'almanach du paradis

                                                         ***


                                             "La beauté n'est pas dans les choses,
                                              elle est en nous
                                             dans notre regard…"

                                                                                   François Cheng
                                                                                    Cinq méditations sur la beauté

mardi 28 février 2012

Zanzibar !

Zanzibar, derrière le mythe...

Construire le mythe ...

« Île des Mille et Une Nuits »,
« Paradis de l’Océan Indien »,
« Porte parfumée »...
peu de noms de lieux ont une charge onirique aussi puissante que celui de Zanzibar : des boutres chargés d’épices poussés par les vents de mousson à la grande saga du clou de girofle en passant par les parfums d’Orient qu’exhalent les palais arabes, des poèmes d’Arthur Rimbaud qui écrivait : « déguerpir, trouver mieux un peu plus loin, je suis appelé à Zanzibar… »,

aux récits d’Henri de Monfreid (qui a hanté pendant près de quarante ans la Corne de l' Afrique, NDLR), c’est toute une littérature et une imagerie qui ont alimenté le rêve, la légende de Zanzibar, au point que d’aucuns se demandent même si cette île existe vraiment.

Car avant d’être un territoire insulaire anthropisé, (…), Zanzibar relève d’abord du mythe construit à partir de sonorités allitératives et quasi onomatopéiques propices au merveilleux et rejoint ainsi la liste de ces noms qui « font rêver » comme Tombouctou, Samarcande ou Ispahan.

... puis le déconstruire

Pourtant l’archipel de Zanzibar existe bel et bien. Il est situé à une cinquantaine de kilomètres de la côte continentale de la Tanzanie à laquelle il est rattaché politiquement par l’Union de 1964. Le terme Tanzanie est d’ailleurs le sigle produit par un condensé entre l’ancien TANganyika continental - aujourd’hui appelé Mainland - et ZANzibar. C’est un archipel composé de deux îles principales, Unguja (communément appelée Zanzibar, 1664 km2) et Pemba (868 km2), elles-mêmes entourées d’une multitude d’îlots.


Dans les faits, la vigueur du mythe de Zanzibar pose problème pour le Zanzibari qui ne reconnaît pas son île dans cette pléthore de descriptions oniriques, quelque peu agacé même de n’exister aux yeux du plus grand nombre qu’à travers cette image stéréotypée tellement éloignée de la réalité de son quotidien (…). Pas plus Zanzibar que toutes les autres îles ne sont des lieux imaginaires échappant aux contingences d’un monde de plus en plus réticulaire et globalisé, théâtre de mutations rapides et profondes.

Car si l’archipel est le plus souvent dépeint comme un éden tropical, il serait sans doute plus juste de le présenter comme « un paradis en voie de développement », renvoyant à la réalité plus amère d’une société précarisée, ravagée par le sous-emploi, la pauvreté, la corruption et la malaria, aux prises avec d’immenses difficultés économiques, sanitaires et sociales. Affectée durablement par les effets du mal – développement, Zanzibar est aussi agitée par de profonds remous politiques liés à un grave déficit démocratique qui obère toute perspective de développement pérenne.

Par ailleurs, il faut en effet en finir avec l’idée que Zanzibar serait un « bout du monde », située dans quelque interstice planétaire, isolée et loin de tout. En l’espèce, Zanzibar n’a jamais été isolée, d’abord parce qu’elle est proche du Continent africain, mais surtout parce qu’elle a joué au cours de son histoire le rôle de plaque tournante du commerce indiaocéanique.

Aujourd’hui, théâtre du déploiement d’activités économiques internationalisées (exportation des clous de girofle, émergence de

l’algoculture, développement du tourisme), reliée au reste du monde par d’intenses liens diasporiques et intégrée dans la toile mondiale de la communication (Internet, télévision, téléphonie mobile, etc.), Zanzibar apparaît plutôt comme un « bout de monde », tant elle est pétrie de logiques mondialisantes.

François BART (géographe, Université de Bordeaux III) et Nathalie BERNARDIE-TAHIR (géographe, Université de Limoges) Article complet sur :
www.cafe-geo.net/article.php3?id_article=1594




Nous sommes arrivés à Zanzibar le 1er janvier 2012 après deux semaines de safari (voir les messages suivants). Nous avons choisi d’aller nous poser à Paje sur la côte Est chez Saori, une petite dame d'origine japonaise installée sur l’île aux épices depuis plus de vingt ans. Elle prépare des sushis (et autres spécialités de la cuisine japonaise) et anime avec son équipe attentive, un lieu paradisiaque : le Paradise Beach Bungalows.

Là, face au lagon émeraude que les cueilleuses d’algues labourent à marée basse, nous avons peu bougé. Nous avons quitté un jour ce havre de paix en dala dala (bus locaux) pour rejoindre Stonetown (le quartier ancien de Zanzibar Town) avec son marché aux épices et ses vieilles portes. Stonetown (site inscrit au Patrimoine mondial) est belle mais c’est une ville décrépite malgré les aides de l’UNESCO.

Charleville, Zanzibar : (…) dans ces deux lieux de départ et de presque retour, le soleil se lève toujours un peu plus tôt qu’ailleurs.

Rimbaud, de Charleville à Zanzibar, texte de Bertrand Courtaud.

lundi 27 février 2012

Dzendzé, gaboussi, kora et Matin brun à Mayotte…


Poésie, musique, slam,théâtre… ont rendez-vous ce soir-là pour dire au revoir au Printemps des poètes à Mayotte.

Dans l'auditorium de l'IFM de Dembéni,le public nombreux a rendez-vous au mariage des mots et des notes. Patrice Cronier, le prince du gaboussi, grand chef d'orchestre de cette soirée a invité MwényéM'madi : musicien comorien et son dzendzé (petite cithare) ! « Quand les Mahorais jouent du dzendzé, la nuit sous la pleine lune, les djinns se mettent à danser… ».


Et aussi Fred Bonnet : auteur de Mayotte-Marseille express (lecture avec Julie) et slameur, Sadani : poète comorien (lecture du recueil Sania), Véronique et Jean-Marc : collectif anonyme des poètes-anthropologues, Thierry Rateau et sa Kora, Thomas au m'kayamba et d'autres voix colorées…

Le gaboussi, instrument fétiche de Patrice Cronier a été présent dans plusieurs accompagnements et surtout lors de Matin brun, la nouvelle de Franck Pavlov. Restons JOYEUX et VIGILANTS ! Des odeurs brunes rôdent…

jeudi 23 février 2012

Les piscines des Badamiers (Petite Terre)…




Les Badamiers


Se lever avec un vent léger
rejoindre les amis et aller
de la barge aux Badamiers

accoster puis se laisser guider
jusqu'à la lagune trouée
à marée basse, dénudée

sur l'eau glisser et marcher
sur des radeaux peu asséchés
son sac et fringues abandonner




l'émerveillement peut commencer
dans les vasques émeraudes
nous jouons les dauphins

des couleurs plein les yeux
des ballets aquatiques
nous jouons à cache-cache

de ce monde mystérieux
le miroir de nos yeux
caresse le merveilleux






magie de la lagune
avec le lent reflux
l'eau reprend tout l'espace

effacer nos traces
sur l'eau marcher, glisser
jusqu'à l'horizon de nos rêves…


jeanPaul des isles

23 février 2012

mardi 21 février 2012

Lac Baringo (Kenya)…




Baringo !

Ton nom claque
à deux pas de l'Équateur
comme un claquement de lasso !

Baringo ! Tout est dit !
On peut s'arrêter là
puis aller à Bogoria…

Baringo ! Encore de l'eau !
ce n'est pas Victoria
alors, encore des mots !





Baringo et sur tes eaux
flottent et pêchent
les Njemps et les Pokots

Baringo ! Les jambes dans l'eau
du croco, et des hippos
même pas peur en haut

Baringo ! Des ors sur l'eau
au couchant ou très tôt
quand tu allumes les brumes





Baringo et dans ses eaux
beaucoup, beaucoup de tilapias,
régal des aigles pêcheurs

Baringo ! Baringo ! Baringo !
et ses oiseaux de couleurs
et le rouge du petit calao

Oh Baringo ! Que d'oiseaux !
oies d'Égypte, petit squacco
ibis, hammerkop, jacanas…





Baringo ! Baringo ! Baringo !
tu n'as rien d'un marigot
mais le paradis sur l'eau

Baringo ! Baringo ! Baringo !
quel est ton secret si beau
sous les vagues de ton pinceau

Baringo ! Baringo ! Baringo !
je veux rester sans mot
mais d'autres naissent de tes eaux





Baringo ! Baringo ! Baringo !
flaque sans ennui avec tes flots
sous un double ciel sans gris

Je te chante Baringo
du très bas jusqu'en haut
tu m'enchantes encore Baringo


jeanPaul des isles

21 février 2012

mercredi 15 février 2012

Bwé Foro et randonnée / lectures…


Un jour, le chef du village, lassé des attaques répétées des pirates malgaches — ils surgissent pour piller le village et enlever les femmes —, propose à tous les hommes d’aller creuser un trou dans la roche au bord de l’océan. Une fois le cap rocheux percé, ils le relient avec de longues cordes à tous leurs bateaux . Ils espèrent ainsi, en ramant de toutes leurs forces, déplacer l'île…

En vain ! Épuisés, ils rentrent chez eux. Depuis ce jour, la roche trouée porte le nom de Bwé Foro (la « Pierre au trou » en shimaoré).


Ce dimanche, nous avons rendez-vous aux farés de la Pointe de Bandrakouni près de Kani Kéli. Nous allons déambuler jusqu'à la « Pierre au trou » en proposant des arrêts lecture à haute voix de Contes inédits de Mayotte (publication récente des Archives départementales de Mayotte : archives.mayotte@cg976.fr). Face au lagon, au creux de la Pierre percée, sous un baobab, nous avons lu des histoires de Djinns, des contes de sagesse des Anciens…

mardi 14 février 2012

Saint Valentin à MayoTTe…

À ma Lou

Apolin, Jacquelin, Valentin
qu’importe le saint
l’important est de vivre
vivre cette joie de chaque jour
dans le battement de l’Amour

Martine, Honorine, Benjamine
qu’importe la sainte
l’important est de sentir le souffle
le souffle de nos mots et de leur chant
se glisser dans nos gestes, nos regards

Aurore, aube, crépuscule
qu’importe le temps
Tu es, Tu es là à chaque instant
à chaque instant dans la quête de lumière
avec nos sources en lointain…

jeanPol

14 février 2012

vendredi 10 février 2012

Lac Nakuru (Kenya)…


Nakuru se présente comme une ville bruyante, embouteillée à 150 km au Nord Ouest de Nairobi. Passage obligé avant de découvrir les beautés de son lac.

Dès l'entrée dans le Parc national, nous sentons que nous allons vivre des instants suspendus entre le ciel et l'immense miroir ouvert comme un album vivant…



Quelque chose dans l'immobilité
des ombres posées là-haut
à la cime de l'arbre plateau


les cigognes s'amusent
ce serait un beau désordre
si tout se mettait à voler

jeanPaul


dans des lumières polies
ils sont au ras de l'eau
posés sur d'invisibles radeaux

becs et silhouettes emplumées
ils sont là ou ailleurs
mouvements et immobilités

jeanPaul





gazelle-girafe
ou gazelle de Grant
ou gazelle de Thomson

peu sûre d'elle
un qui vive éternel
à la recherche d'herbe nouvelle


jeanPaul







Drôles de zèbres

En joli pyjama rayé
pour donner le tournis
à ses poursuivants affamés ?

ou

Drôles de codes-barres
pour se reconnaître entre zèbres
dérouter les mouches tsé-tsé… dare-dare ?

jeanPaul





Silhouette surgie de la préhistoire
colosse aux allures de char d'assaut
le rhinocéros se fait rare

Poursuivi pour ses cornes fantasmées
myope et d'un naturel placide
il affectionne siester à l'ombre


jeanPaul



Girafes

La girafe réticulée
à la robe brun foncé
et pelage en écaille de tortue

La girafe de Rothschild
cousine de la réticulée
mais en chaussettes blanches

La girafe massaï
a collé un peu partout
des feuilles d'érable à l'automne


jeanPaul




« Mais le rugissement de mort que j'attendais ne vint pas. À sa place résonna cette sorte de rumeur énorme, rauque et joyeuse, cette grondante allégresse qui servait de rire à King. La patte formidable, au lieu de s'abattre sur Patricia et la mettre en pièces, s'approcha d'elle tout doucement, les griffes rentrées, cueillit la petite fille et la coucha par terre avec gentillesse. Patricia chargea de nouveau et King riposta comme il venait de le faire.


Mais il avait pris goût au jeu. Il ne se contenta plus d'envelopper de sa patte la taille de Patricia et de la déposer sur le sol. Il la renvoya comme une balle . Chacun de ses coups était un miracle d'élasticité, de mesure et de délicatesse. »


Joseph Kessel

Le lion

mercredi 8 février 2012

Massaï-Mara (Kenya)…







Ces animaux dits sauvages ?

Ils possèdent leur territoire
s'y répartissent de façon précise !

Telle autruche ne se dandinera
que dans les herbes hautes
telle autre passera derrière
pour telle couche d'herbes


Telle girafe ne se gavera
que de telles feuilles savoureuses
telle autre s'inclinera avec grâce
pour brouter telle herbe rase







La girafe et la girouette
Vent du sud et vent de l'est,
Tendent leur cou vers l'alouette
Vent du nord et vent de l'ouest.

Toutes deux vivent près du ciel,
Vent du sud et vent de l'est
À la hauteur des hirondelles,
Vent du nord et vent de l'ouest.


Robert Desnos
Chantefables






À quatre plumes bien tirées
ces demoiselles à aigrette
s'en vont à petits petits pas
au moindre bruit effarouchées

Elles plongent soudain la tête
l'espace d'un coup de bec
et redressent le cou aussi sec
dans une mesure à deux temps


jeanPaul





Soudée au creux du corps, l'attente
rien ne peut la combler, rien

immobiles, les paupières veillent
leurs frémissements discrets
empêchent tout sommeil
l'attente dure sous le soleil

seule, la chair invisible encore
viendra peut être combler les corps


jeanPaul

La Réserve nationale de MassaÎ-Mara est le prolongement naturel du Serengeti en Tanzanie. Les gnous lors de leur migration ignorent bien sûr cette frontière !

Plusieurs scènes de Out of Africa ont été tournées au nord-ouest, près de l'escarpement d'Esoit Oloolo culminant à 2 000 m.

Nous avons aperçu quelques manyattas (villages) du peuple massaï mais ils sont de moins en moins nombreux et certains, trop proches des portes d'entrée de la réserve, ont été rasés…

mercredi 1 février 2012

Le Printemps des Poètes à Mayotte (2012)



Un enfant m'a dit

Un enfant m'a dit : la lune
est une banane dans le noir

Un enfant m'a dit : la lune
est une moustache de bacoco

Un enfant m'a dit : la lune
est un oeuf dans le ventre d'une poule

Un enfant m'a dit : la lune
est un toboggan dans la cour de récréation

Un enfant m'a dit : je voudrais
mettre la lune autour de mon poignet
pour qu'elle brille !

Irifaï ATTOUMANI - LAURÉAT
CPE École d'application Dembéni


La pluie

J'aime le moment qui précède la pluie
le ciel tout à coup descend
les nids se cachent sous les feuilles
les fleurs tremblent de froid
les chats sont à l'abri
les vieux ont pris leur laine
tout n'est plus qu'attente

On frissonne du plaisir d'être au chaud
tout se dit dans le silence
le cœur marche à pas de loup
sur les feuilles de bananier
comme on sonne à la porte
les premières gouttes tambourinent
et soudain, sur le toit de la case
un gros paquet de pluie s'écrase…

On ne s'entend pluie…

Mari SALOUA Lauréate
CM2C École d'application Dembéni




C'est le 14e Printemps des poètes ! Et cette année, un spécial MayoTTe est proposé du 13 au 17 février 2012 ! Sur le thème « Enfances », les élèves des classes de l'école primaire de Mayotte sont invités à participer à des activités de création poétique. Nassuf Djailani & JeanPierre Siméon sont à Mayotte pour un une semaine dans les écoles…

Malou a proposé diverses activités dans les écoles primaires du Sud de l'île. Quant à moi, je me suis régalé à animer un atelier d'écriture dans la classe CM2 de Steve à Dembéni. Voici quelques traces de ces jeux avec les mots en liberté…

À VOS PLUMES ! Vous pouvez nous envoyer des textes (et des commentaires sur le blog) que nous sélectionnerons pour le blog : http://lesmotsarts.blogspot.com